mardi 28 février 2012

La Majorité se fissure




Trois partis de la Majorité (Adil, RD, MPR) ont encore remis au goût du jour cette fameuse question du dialogue et de la " reconfiguration " même au sein de la Coalition des partis qui soutiennent le président Aziz.

La rencontre entre l’ancien Premier ministreYahya Ould Ahmed Waghf, président du parti Adil, Kane Hamidou Baba du MPR, et Moustapha Ould Abeiderramane, président du Renouveau Démocratique(RD) survient deux jours seulement après celle qui a eu lieu au palais présidentielle entre le président Aziz et les représentants du parti au pouvoir, l’Union pour la République (UPR).

C’est bien d’une réplique des partis " oubliés " dans le partage du pouvoir qu’il s’agit, quand on sait que des formations comme le PRDR (Parti républicain, démocratique et social) et l’UDP(Union pour la démocratie et le progrès), seconds sur la liste du partage des " privilèges ", n’ont pas fait entendre des voix aussi discordantes que celle de cette alliance tripartite au sein de laCPM (Coalition des partis de la Majorité).

Certes, il ne s’agit pas encore là d’une remise en cause frontale de la gestion du pouvoir parMohamed Ould Abdel Aziz mais la tentative de ce dernier de booster, à nouveau, le parti-Etat ne semble pas plaire aux leaders de ces trois partis qui, avec deux illustres sortants de la Majorité (Hatem et l’AJD/MR) avaient fait entendre, depuis quelque temps, des voix dissonantes au sein des soutiens du pouvoir.

En appelant à un nouveau dialogue, ces partis s’opposent, en fait, à la ligne édictée par les partis d’opposition ayant pris part au dialogue (APP, Al Wiam, Sawab) et remettent en cause les dernières " suggestions " du président Aziz, allant dans le sens du refus d’un dialogue bis et de l’imposition au pouvoir de la loi de la COD.

Tout indique que le pouvoir doit maintenant agir sur trois fronts : la confrontation ouverte avec laCOD, qui prévoit d’organiser une grande marche populaire à Nouakchott, le 12 mars prochain et veut démontrer à l’occasion qu’elle est en train de revenir en force, l’opposition " participationniste " qui s’impatiente en ne voyant pas le pouvoir se presser pour mettre en œuvre les clauses de l’accord issu du dialogue, et une partie de la Majorité qui veut avoir " le retour " de son soutien.

L’appel par ces trois partis de la Majorité à un nouveau dialogue inclusif, " auquel doivent prendre part tous les acteurs politiques du pays " est une réclamation on ne peut plus claire pour une redistribution des cartes. Une manière aussi de dire que la crise politique ne peut pas être ramenée, qu’on certains cherchent à le faire croire, à cette traditionnelle " bipolarité " entre Majorité et Opposition, puisque, maintenant, nous avons la certitude d’avoir deux " oppositions " et deux " majorités " !

Se positionner

La sortie remarquée de ces trois partis s’inscrit-elle, réellement, dans la perspective d’une remise en cause de l’hégémonie de l’UPR ou bien dans celle, moins rebutante pour la Majorité, d’un positionnement par rapport aux prochaines élections municipales et législatives ? C’est cette dernière perspective qui parait plus ou moins vraisemblance, quand on sait que les trois partis qui viennent de provoquer des remous au sein de la Majorité ont dévoilé une partie de leur stratégie de repositionnement politique.

Ils ont convenu, au grand jour, et à travers un communiqué, de " coordonner leurs actions politiques à la veille des prochaines élections pour prendre en considération l’avis de l’ensemble des acteurs de la majorité. " Nonobstant la remise en question " classique " de l’opposition aux politiques menées par le pouvoir, ces partis ont eu le mérite, incontestable, de parler un discours autre que celui de la Majorité " consentante ". 

De dire, par exemple, qu’ils sont " préoccupés par les tensions politiques et l’insécurité " aux frontières du pays et " Soucieux des grandes difficultés auxquelles (le) peuple est confronté (conséquences de la sécheresse, perspectives de famine, envol des prix des denrées de première nécessité, extension du chômage, etc.).

Mais c’est évidemment l’appel lancé au pouvoir pour prendre conscience de la " nécessité de la participation de tous les acteurs politiques à l’œuvre de renforcement de l’unité nationale, de la démocratie et du développement " et l’attachement de ces formations " au dialogue franc et ouvert comme seule méthode pour résoudre les problèmes qui se posent au pays " qui gênent un peu les défenseurs de la position officielle, réitérée par le président Aziz aux parlementaires de la Majorité.

Même si, au finish, ces trois partis ne s’éloignent pas trop de la ligne commune : Attachement aux résultats du dialogue (création de la CENI, extension de la proportionnelle, amélioration du quota des femmes, interdiction des candidatures indépendantes, découragement du nomadisme politique, renforcement des pouvoirs du parlement, etc.) entre la Majorité et certains partis de l’Opposition.

C’est sur la tentative de " faire marche arrière " qu’il semble ne pas être d’accord avec ceux qui ont un intérêt quelconque à tergiverser ou à bloquer un processus auquel on voudrait donner - déjà - une teneur " constitutionnelle " jugée très équivoque par la COD.

Sneiba Mohamed.


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